« Tout Pour Elles : Corinne gagnante du Blog d'Or ! | Page d'accueil | Dingueries »

13.09.2006

Les Bienveillantes

Mon amie Stella, grande lectrice, me parle avec enthousiasme et émotion du roman de Jonathan Littell, "Les Bienveillantes" publié chez Gallimard.

Le narrateur Max Aue, officier SS durant la Seconde Guerre Mondiale, écrit ses souvenirs "Pour mettre les choses au point pour moi-même, pas pour vous". Personnage cultivé, docteur en Droit, il a fait partie des SS, ceux qui "nettoyaient et éliminaient" Juifs et Bolchéviques. A travers son personnage, Jonathan Littel relate la banalisation du mal, comment la guerre fabrique et détruit les hommes.

Stella s'étonne de mes réticences envers ce livre, je lui dis que je n'ai pas le courage de le lire, ni peut-être la force, cette époque me bouleverse trop.

Mon enfance a été hantée par les récits de cette guerre. Mon père nous racontait ce qu'il avait vécu lorsqu'il était prisonnier ; la faim, le froid, ses souffrances. Il avait 28 ans en 1940, déjà une guerre derrière lui (en Espagne) et a toujours pensé qu'il s'en sortirait. Ses idées politiques ont été un vrai soutien, et il luttait à sa façon, dérisoire peut-être. C'était un conteur né, et nous les enfants en redemandions : Papa raconte encore l'histoire de "l'essence qui ne gèle pas"... Il mimait, debout, assis, changeait de voix, il avait toujours des anecdotes drôles, humaines, même si l'histoire était souvent cruelle. C'était la guerre vue par un Titi charentais, militant, que son humour avait bien aidé dans les moments trop durs. Et en 1945, sa famille était toujours là, la maison debout, son réseau d'anciens combattants et les amis du Parti aussi. Même s'il est revenu maigre, malade, il n'avait pas perdu son énergie, ni ses convictions.

Maman, elle, avait extrêmement souffert en Allemagne, c'était une obsession. D'abord parce que sa famille et elle n'étaient pas de vrais Allemands, et surtout pas des bons. Ses parents étaient forains, donc nomades, ils avaient un manège, pas le genre apprécié du tout par le régime... Enfant elle a vu s'installer le nazisme, à l'école le bourrage de crâne et la tyrannie sévissaient. Plus tard en pleine guerre, elle qui avait appris le métier de modiste fut réquisitionnée pour le travail en usine, les hommes étant au front. Les conditions de travail étaient dures, les mêmes que celles des prisonniers, Français entre autres. Elle tomba amoureuse de mon père, rayon de soleil de sa jeunesse. En 1944, la naissance de mon frère alors qu'elle n'avait que 20 ans fut tragique, jetée à la rue par sa famille, elle trouva une petite chambre à Leipzig grâce à l'aide d'une vieille dame.

La fin de la guerre et les mois qui suivirent ressemblent à ce que tous les pays vaincus subissent : l'humiliation, les rudes conditions d'existence, les malheurs de la défaite. 

Souvent mes parents se parlaient en allemand, lorsqu'ils ne souhaitaient pas que nous comprenions leurs échanges. Parfois, les larmes coulaient tout doucement sur le visage de Greta, ma mère ; là nous ressentions sa détresse avec impuissance...

Maman aussi, nous parlait de cette période ; je la revois, tournant sa cuillère dans son café, c'était en général le jeudi après-midi ; J'étais terrifiée par ce qu'elle racontait : le récit des bombardements, mais surtout son obsession de protéger son bébé, de trouver à manger, de lutter contre le froid de l'hiver, et son immense solitude après le départ de mon père en France. Elle pleurait en évoquant mon frère qui à preque trois ans, ne comprenait pas pourquoi elle ne lui donnait pas à manger "Mais Robert pas méchant" lui disait-elle. Broyée, elle était broyée par cette guerre et les mois qui ont suivi.

L'arrivée des troupes russes en Allemagne lui fit vivre des moments dont elle ne se remit jamais. Ils arrivèrent en vainqueurs, sauvages et violents, s'emparant de tout, dépouillant les gens dans la rue...

Je ne comprenais pas toujours ce que Greta racontait mais je ressentais et faisais mienne son angoisse ; la nuit je me demandais comment trouver une cachette si un jour la guerre recommençait. J'avais peur d'aller me coucher, ses paroles me revenaient, et je commençais à faire de terribles cauchemars. Je hurlais dans mon sommeil, réveillant toute la maison, et revenais à moi, hébétée, envahie de chagrin.

Un jour, adolescente, je compris brutalement ce que Maman nous avait révélé : elle disait  J'ai été attaquée par les Russes, et ses propos prirent alors tout leur sens pour moi. Pliée en deux, le ventre brûlant, le coeur battant à toute allure, angoissée, je décryptais ses plaintes, et pleurais à chaudes larmes. Mes cauchemars se firent plus fréquents, je n'en pouvais plus.

J'essayais de parler avec elle, mais elle avait commencé à se retirer dans son monde, elle contourna le dialogue. Je n'insistais pas, à quoi bon la tourmenter ?

Je dis souvent que j'ai l'impression d'avoir vécu la guerre, c'est vrai, je suis sincère même si je sais que cela peut choquer et que c'est bien excessif... Je n'ai jamais pu regarder certains films sur cette période sans ressentir une oppression très forte ; même La Vache et le prisonnier avec Fernandel me rendait malade !

Les années ont passé, j'ai travaillé et avancé, je n'ai plus de cauchemars, heureusement car plus d'une fois au début de notre vie commune, Corbillo a failli avoir une crise cardiaque réveillé en sursaut par mes cris !

Les années qui viennent de s'écouler m'ont peu rassurée sur le statut des populations civiles en temps de guerre, et sur le sort des femmes... Que de continuite dans le malheur et la violence...

J'hésite à publier ce billet, trop intime, trop personnel, mais depuis une semaine, je pense beaucoup à ma conversation avec Stella, au bouquin, à mes souvenirs... Je n'ai pas l'esprit léger, et j'aimerais être capable de choisir de lire ou non ce livre. Sans avoir la peur au ventre.

 

 

Trackbacks

Voici l'URL pour faire un trackback sur cette note : http://fauvette.hautetfort.com/trackback/636117

Commentaires

J'ai lu une critique de ce livre et, sans avoir vécu la même chose que toi, j'hésite fortement à le lire.

Comme toi, les "histoires" de guerre me bouleversent, c'est sans doute dû à ma mémoire alsacienne où rien n'était simple, où les drames étaient quotidiens. Par exemple, le frère de mon grand-père a été envoyé en Russie à 18 ans et on ne l'a jamais revu ; Mon arrière grand-mère a caché et fait passer en Suisse de nombreuses personnes et elle a été sérieusement inquiétée...

Tu as raison de dire que rien n'est jamais acquis, que l'Histoire peut se répéter, que les Hommes n'en tirent aucune connaissance et que c'est à pleurer...

Ecrit par : Bailili | 13.09.2006

Je suis ému par ce récit. La guerre est la pire des choses ! Et les hommes ne changeront jamais !Je n'ai rien à dire de plus, ton témoignage est important, tu as bien fait de le publier... Pour que nous oeuvrions toujours pour la paix qui n'est jamais acquise! Merci, j'espère que d'écrire t'apportera un peu de paix!

Ecrit par : paysanheureux | 13.09.2006

Je partage votre avis, j'hesite moi aussi à lire ce livre.....

Ecrit par : la JD | 13.09.2006

Trés émouvant ce texte, je vais le relire.

Ecrit par : mab | 13.09.2006

J'avais lu tes boulversants textes sur ta famille et ta maman. Ce que tu écris aujourd'hui est tout aussi émouvant, et souligne, s'il en était besoin, combien la transmission orale de la petite et surtout de la grande histoire et de ses horreurs laisse des repères indélébiles dans le coeur d'un enfant.
Quant au livre, tu le liras peut-être le moment venu, mais ce n'est pas le plus important ...

Ecrit par : madame proprette | 13.09.2006

Ton billet es très émouvant, je crois que tu as bien fait de le publier. Même si parfois cela n'est pas suffisant, tu connais les bienfaits de l'écriture.
De la guerre, ma grand'mère m'a souvent raconté des faits arrivés dans mon village natal et chaque fois que je passe devant le monument aux morts je "revis" ces récits et pourtant je suis loin de la réalité...
J'ai à la maison plusieurs volumes sur ces périodes, je lis par petits bouts, c'est parfois insoutenable.
Mille bisous à toi.

Ecrit par : Pralinette | 13.09.2006

Nous ne progressons pas. C'est terrifiant même comme on régresse dans l'humanité. On dirait que plus on en sait, plus on s'ingénie à trouver pire dans les mauvais traitements à infliger à d'autres.

On nous appelle les humains... alors pourquoi est-ce que ça devient une qualité, d'être humain ?

Ecrit par : Anne | 13.09.2006

merci pour ton emouvant message, Fauvette.....
oui, il y a de mauvais humains, mais aussi heureusement beaucoup de bons, et meme de tres bons...
je t'embrasse.

Ecrit par : Flo | 13.09.2006

merci de ce beau billet de vie

Ecrit par : jid | 13.09.2006

Oui je te trouve courageuse d'écrire sur ta famille et toi....celà fait presque 2 ans j'avais ouvert mon blog au nouvelobs.. et j'y ai déposé deux textes sur cette époque, ces textes vont apparaitre prochainement sur mon blog actuel. Je suis restée discrète ....et puis j'en ai eu marre alors.....si tu as parcouru de fond en comble mes albums tu sauras de quoi je parle.....
Nous devons vivre avec les blessures du passé, pour ma part j'en suis imbibée et j'en souffre même si je suis née peu après la fin de la guerre...Les parents transmettent même s'ils ne le verbalisent pas....Comme ainée j'ai tout pris c'est ma plus jeune soeur qui me l'a dit je lui ai servi de paravent....je t'embrasse....

Ecrit par : nénétte | 13.09.2006

Moi aussi j'aimerais croire qu'un jour on cessera d'attaquer les femmes surtout quand je regarde ma fille. Je t'embrasse.

Ecrit par : sophie | 13.09.2006

Ouch ! Une larme coule sur ma joue tandis que je rédige ce commentaire.

Ma mère a vécu l'occupation. Elle a mis beaucoup de temps à en parler. Et puis, il y eu mon premier choc, à l'école, devant une photo célèbre pris dans un pogrom polonais (ou on voit en premier plan un petit garçon les bras en l'air...)
Je suis rentrée à la maison et je n'ai pas cessé d'en parler. Puis j'ai commencé à dévoré tout ce que je pouvais sur le sujet. J'avais 11 ans et j'ai lu des témoignages particulièrement durs que personne dans ma famille n'arrivaient à lire... Moi je voulais savoir... tout ... Avec les yeux de tous les protagonistes... Peut être pour comprendre.
Alors Maman a commencé à en parler... Et j'ai su, j'ai vu les images qu'elle a vu, j'ai senti les odeurs qu'elle a senti, j'ai entendu les ordres, les insultes, j'ai ressenti sa peur, son horreur, la folie des uns et des autres...

Depuis, même si je me suis un peu calmée, je tiens à continuer à lire sur le sujet, à voir aussi les photos, les films. C'est important pour moi...

Oui les hommes ne retiennent rien des erreurs, des horreurs du passé... Je suis parfois très vive lorsque j'entend dire qu'au Moyen Age (ma période de prédilection), les hommes étaient cruels... Non ! Nous les humains l'avont été, le sommes et le seront encore et toujours... Jusqu'au jour où nous serons enfin digne de nous appeler Humanité...

Je t'embrasse, la gorge serrée, et te remercie de ce témoignage... Merci de l'avoir publié...

Ecrit par : Erin | 13.09.2006

Nous sommes bien de la même génération Fauvette !
Mon grand-père fut prisonnier aussi et ses récits ont bercé mon enfance. Par mon père, ce fut ceux de la guerre d'Algérie. Notre génération n'a pas de guerres "directes" à raconter à ses enfants. J'espère que cela va continuer ...

Merci de faire de ce blog le dépositaire de ta mémoire.

Ecrit par : Madeleine | 13.09.2006

Comme Madeleine et d'autres personnes, je me reconnais dans ce témoignage, même si ma famille a moins souffert de la guerre que la tienne. C'est cependant un livre que je ne lirai pas, je suis trop sensible à tout ce qui touche cette période.
Peite fille, la première chose que j'ai visitée est le village martyr d'Oradour-sur-Glane.
Adolescente, je suis partie en voyage scolaire sur les lieux d'un camp de concentration.
Nous avons été éduquées dans l'idée qu'il ne fallait plus jamais que cela se reproduise, mais je me demande si cette exigence se transmettra aux générations futures.

Alors certainement que la lecture de ce livre dont on dit grand bien peut être nécessaire à ceux qui veulent comprendre, savoir... pour les nouvelles générations (je crois que l'auteur a environ 35 ans)

Je t'embrasse

Ecrit par : samantdi | 13.09.2006

ces douleurs du passé qui poursuivent..
à la lecture de ta note de ce jour très personnelle j'ai
la gorge nouée
et mal au ventre

je ne pense pas lire ce livre...parce qu'en ce moment
je n'ai pas envie de pleurer sur les horreurs de cette guerre !
en tous les cas pas aujourd'hui..

Sur la plage un couple d'amis lisaient ce genre de livres cet été et moi je les ai trouvés tristes.....
tu as certainement bien fait pour la note pour mettre les choses au point.....
Bye Fauvette !

Ecrit par : dite | 13.09.2006

Je n'ose rien ajouter à ce que tu relates de l'histoire de ta famille. Tout commentaire me paraîtrait un peu déplacé, même si les mots des lecteurs dans ce cas là sont importants. Disons que je t'ai lu et... entendu aussi.

A propos de ce livre, les avis ont l'air partagés. Il me semble que peut-être c'est un livre de la 3ème ou 4ème génération de l'après-guerre. Ils ne peuvent pas se la représenter et en parler comme leurs aînés peut être.

Mais il y a par exemple le livre (BD en fait) de Art Spiegelman : Maus, qui raconte cette guerre du point de vue d'un enfant de parents qui l'ont vécu. Il y a à la fois le récit de ce qu'il s'est passé, accompagné des difficultés que crée ce genre d'héritage pour la génération qui en hérite sans l'avoir connue.
Peut être que tu t'en sentirais plus proche. Il n'y a pas de banalisation ou de fascination en tout cas.

Ecrit par : LaVitaNuda | 13.09.2006

Dans mon émotion à la lecture de ton billet, je reconnais une même cicatrice brûlante à propos de cette période vécue par nos parents.
Merci pour ce partage, petite amie

Ecrit par : martinecarol | 13.09.2006

Témoignage très émouvant, merci d'avoir publié ce billet.

Ecrit par : Anne-Ma | 13.09.2006

Je suis moi aussi très très émue par tes mots...
Moi au contraire, je suis affamée de savoir...pour enfin pouvoir contrôler certaines peurs...
Merci d'avoir publié ce billet qui éveille chez d'autres tant d'échos...

Ecrit par : Coumarine | 13.09.2006

Ma mère est née en 1938, mon père en 1929, elle a connu la 2e guerre mondiale en Normandie, lui la guerre en Espagne et la guerre d'Indochine. J'ai toujours eu l'impression d'avoir connu une guerre, sans doute à cause de leurs récits et puis nous n'étions pas riches et il fallait se rationner! Maintenant je les enseigne ces guerres, j'ai toujours ces impressions...c'est mon héritage familial!

Ecrit par : enriqueta | 13.09.2006

Que de peine je ressents

Ecrit par : Christian | 14.09.2006

Merci pour ce billet. Mon père était lui aussi travailleur de force en Allemagne. Il était en usine, puis chez des agriculteurs. En 1958 il est reparti en Allemagne embrassé ses agriculteurs encore vivants. Il nous disait combien il avait été épargné des horreurs de la guerre en leur compagnie. "que le paix soit entre les hommes " disait-il.

Ecrit par : Parisgotte | 14.09.2006

J'ai acheté le livre ce matin...! Je m'attends à y trouver le point de vue du bourreau, peut-être pour chercher à comprendre comment un être humain cultivé peut se déshumaniser ainsi - ou pire encore, comprendre comment cette barbarie constitue une facette de l'humanité.
De par mes valeurs, je voudrais vivre la fraternité humaine - aimer mon prochain, dit-on en langage chrétien - mais c'est un apprentissage... Peut-être que ce livre me montrera des pistes.
Mon grand-père a été prisonnier en Allemagne pendant 4 ans de guerre. Cela ne s'est pas trop mal passé sur place mais le retour au cocon familial s'est avéré plutôt douloureux... Il ne s'y sentait plus à sa place, il n'arrivait plus à communiquer. La vie familiale a évidemment été bouleversée, et il en est resté des cicatrices même à ma génération.
Pour cela aussi, je voudrais comprendre.

Ecrit par : Forestine | 14.09.2006

Très émouvant en effet. Comment toutes ces horreurs vécues par nos proches pourraient-elles être oubliées ? Que de dégâts ont-elles fait !

Ecrit par : tanette | 14.09.2006

C'est amusant. J'ai récemment discuté de cette période avec ma maman (future madame michou qui pourrait être aussi ta maman). Certains traumatismes ressortent parfois. Un souvenir, une anecdote. Une volonté d'effacer certains passages de sa mémoire.

Ecrit par : chondre | 14.09.2006

J'ai aussi lu des papiers sur ce livre et il semble effectivement relater de façon très "intérieure" les faits de cette guerre. J'avoue ne pas en avoir envie non plus...
Merci Fauvette de partager avec nous l'histoire de ta famille. Tu as raison de le faire, pour toi et pour eux. Je n'aime pas beaucoup l'expression "devoir de mémoire", je préférerais qu'on dise "besoin de mémoire", pour vivre, pour aller plus loin, pour essayer de corriger la trajectoire peut-être, même si l'actualité peut nous rendre pessimiste chaque jour à ce sujet (mais partout, il y aura toujours des "justes" et un peu d'espoir, non ? En tous cas je veux y croire)

Ecrit par : Traou | 14.09.2006

Je viens à peine de publier un court billet sur Les Bienveillantes et je tombe sur le vôtre, si poignant.

Je recommande quant à moi la lecture de cet ouvrage, que je place dans la ligne de "La mort est mon métier", de Robert Merle. Lequel avait en son temps subi les mêmes critiques que Jonathan Littell. Le mot "complaisance" en faisait hélas partie, alors qu'aucun des deux écrivains n'en a eue.

Je suis le petit fils d'un résistant, un de ceux trop rares qui s'opposèrent à l'occupant bien avant le 22 juin 1941 ou le 8 mai 1945. Je suis aussi le neveu d'un ancien de la 2ème DB. J'ai donc baigné toute mon enfance dans le culte de la Résistance et du combat contre le nazisme.

Mais la lecture du Littell me fait me demander, non sans angoisse : "Et moi, si j'avais été allemand en 1933, n'aurais-je pas suivi Hitler comme tant d'autres, jusque dans l'horreur la plus absolue ?". Car il a été établi que la pluspart des bourreaux, avant de basculer dans l'abomination, étaient des gens comme vous et moi. Hitler a lui aussi été un enfant qui aimait sa maman, ne l'oublions pas.

Je n'aurai, et c'est heureux, jamais de réponse à ma question. Je ne saurais pas non plus, et c'est tout aussi heureux, si en d'autres circonstances j'aurais participé aux crimes du communisme, dont j'ai été le témoin, sous d'autres cieux. Et qui sont à mes yeux tout aussi impardonnables que ceux du nazisme.

Merci encore pour votre billet.

Ecrit par : Sambucucciu | 14.09.2006

Merci d'avoir publié ce billet Fauvette. Il m’a ému. Il n'est pas trop intime, il permet de te connaitre un peu mieux, plus en profondeur, il n’y a pas à se sentir gêné par ce genre de billet. Partager est bien une façon de domestiquer ce qui peut être douloureux, ils servent à cela aussi nos blogs.

Quant à lire ce livre, il ne faut surtout pas tenter de se forcer. Je crois que ce qui en rend sa lecture délicate c’est le point de vue auquel il se place, une analyse de l’intérieur de la banalité du mal, celle dans laquelle peut-être dans certains contextes il peut être si facile de tomber.

Ecrit par : valclair | 14.09.2006

Je vous remercie tous de vos commentaires bienveillants, affectueux, amicaux, et avisés.
Merci aussi d'avoir compris ce que je ressens, et ai tenté d'exprimer.
Vous m'apportez beaucoup, ce blog me permet de mieux communiquer, de mieux comprendre. Aussi bénéfique qu'une pierre précieuse, que l'amitié, et l'amour.

Ecrit par : Fauvette | 14.09.2006

Bises alors.

Ecrit par : Francois et fier de l'Être | 15.09.2006

j'avais envie de dire, a la lecture des prmières lignes de ton post : "Quellle chance que tes parents t'aient parlé de cette période!" je ne peux plus le dire. Ma mère m'en aun peu parlé, son enfance au grand duché du luxembourg, son amie juive qui a disparue un jour, la course de la maison a l'abris, le bruit des bombes. je trouvais ca terrifiant, j'adorais ça. Plus tard, a l'école, quand on a abordé le sujet en cours d'histoire, je n'ai pas pu m'enpécher de pleurer malgré la moquerie des "camarades" de classe. J'ai vu aulocauste, le liste de schindler, j'ai pleuré encore, et maintenant, a la lecture de ce billet, l'émotion monte encore. Et toujours les mêmes question, quoi qu'on m'ai dit, Pourquoi? Comment? Cette guerre est restée pour beaucoup "La chose" qui ne doit plus jamais se reproduire. Et pourtant! Parler encore pour ne pas oublier, dire ces mots jusqu'a ce qu'ils perdent toute signification... Rien n'y fait. Chaque fois la même souffrance, la même impuissance, cahque fois les même questions : Pourquoi, comment?
Bon, j'arrête là mon commentaire fleuve, je sors. ;)

Ecrit par : onze | 16.09.2006

Gigantesque merci, Fauvette, pour ce billet.
Mes parents avaient 16 et 10 ans au début de la guerre. Elle a déterminé leur vie. La douleur est indicible pour maman, moteur pour papa, encore maintenant (à 16 ans, il est parti en chantier de jeunesse, puis la Résistance, puis entré dans l'armée).
Ils vont souvent en Allemangne. Envie de comprendre. Envie de ne pas détester tout un peuple à cause d'un épisode monstrueux.
J'ai lu 2 livres d'un allemand qui m'ont passionnée, dans lequel il ne minimise en rien l'horreur. Il était militaire, mais pas SS. Ses livres sont d'une bonté, d'une recherche de compréhension, et d'une simplicité étonnantes.
Il s'appelle August von Kageneck, et ses livres "lieutenant de panzer" et "examen de conscience". Je me permets de vous les recommander, Fauvette, plutôt que celui dont vous parlez. Mais ne pas lire sur ce sujet ne serait pas non plus incompréhensible !

Ecrit par : hoplalavoila | 16.09.2006

Je me permets de rajouter à la liste des ouvrages d'August von Kagenek :

- La guerre à l'Est

- Notre histoire 1922-1945

Ce dernier a été co-écrit par Elie Denoix de Saint Marc, qui fut l'un de nos plus jeunes résistants et déportés. Ce livre met en // la vie de ces deux hommes, de l'année de leur naissance jusqu'à la fin de la guerre.

A lire aussi, dans un tout autre genre mais si proche pourtant du Littell : Vie et destin, de Vassili Grossmann. Le seul roman (je dis bien roman) avec celui de Pasternak, peut-être, qui fit trembler le Kremlin. Selon moi le Grossmann est un ouvrage majeur, qu'il faut absolument lire.

Ecrit par : Sambucucciu | 16.09.2006

Très émouvant ...

Ecrit par : Guess Who | 17.09.2006

Emue moi aussi à la lecture de ce billet .
Nous portons en nous les souffrances de nos parents; C'est souvent un lourd fardeau.
J'aimerai croire que "ce qui n'est pas oublié ne se repète pas"

Ecrit par : dilou/zaza | 18.09.2006

Ah Fauvette, quel beau post, je suis très émue moi aussi, d'autant plus émue que j'ai fait un magnifique voyage en Allemagne cet été et que ce bouquin me sera prêté très bientôt, je suis très impatiente de le lire tout comme je suis pressée de lire le dernier ouvrage de Gunther Grass.
Je t'embrasse.

Ecrit par : tita67 | 18.09.2006

Je savais bien que j'avais lu quelque par une note sur ce bouquin et voilà je suis revenue de te voir, mon mari vient de l'acheter il parait qu'il risque d'avoir le Prix Goncourt, j'attends des réactions du futur lecteur à domicile....

Ecrit par : bonaventure | 23.09.2006